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Coups de cœur du libraire

Marvel et ses éternels relaunch – cette fois avec Captain Marvel aux mains de Kelly Thompson et Carmen Carnero … et DC et sa pépite qu’est Batman par Tom King. Comment ne pas pleurer de joie et de douleur mêlées à la lecture de cet épisode ? Comment ne pas souffrir pour lui, homme abandonné et seul, meurtri par les continuelles épreuves qui jalonnent son chemin héroïque ? Mais n’est ce pas le propre des héros que de surmonter leur douleur, et finir par trouver la félicitée ?

Tout comme DC il y a quelques mois, Marvel profite de la sortie de l’un de ses films pour relancer la série du héros concerné … et aujourd’hui il s’agit d’une héroïne, Captain Marvel (Carol Danvers). Celle que l’éditeur essaie depuis de nombreuses annéées de pousser au premier plan, d’en faire tour à tour la protectrice de la Terre et leader d’Alpha Flight, la plus grande héroïne de la terre, la tête de pont de l’un des deux groupes s’opposant lors d’une guerre civile, est de retour. Ne vous fiez pas à la cover d’Amanda Conner, l’intérieur dessiné par Carmen Carnero est fabuleux.

Prenant la suite directe de la mini-série the Life of Captain Marvel, ce premier numéro de la série revient aux fondamentaux de l’héroïne, de retour sur terre après ses aventures spatiales. On la retrouve ainsi aux prises avec une créature sortie tout droit d’un numéro des FF, portant secours à Jessica Drew, aka Spider-Woman, sa BFF. Pas de conversation aux multiples ramifications, pas de bataille ayant l’univers pour enjeux. On revient aux fondamentaux de l’héroïne avec Kelly Thompson, et c’est appréciable. Quant à Carmen Carnero, l’artiste espagnole dont j’avais vanté les vertus sur X-Men Red déploie une nouvelle fois ses talents.

Dans un épisode aux multiples hommages (ou clins d’oeil, le terme serait plus approprié) à leur fantastique épopée Mister Miracle (dont l’intégral ne saurait tarder), Tom King et Mitch Gerads mettent face à face Batman et docteur Pyg. Dans un épisode (presque) entièrement muet, où seules les pensées de Batman jalonnent les cases de Gerads, on assiste, spectateur impuissant, à une cruelle épiphanie. Plus robot qu’humain, se répétant encore et encore les mêmes phrases dans l’espoir de se libérer de l’emprise de Pyg, Batman/Bruce réalise soudain qu’il est avant tout humain. Qu’avant d’être le meilleur détective au monde, il est ce petit garçon meurtri par l’assassinat de ses parents. Qu’avant d’être cette machine de combat, il est un homme qui souffre (souffrance très bien rendu par la variant cover de Frank Miller)

Sa souffrance n’agit plus comme un brouillard devant ses yeux, elle n’est plus le moteur qui le fait vivre – comme lorsqu’il menaçait Freeze de le lâcher au-dessus de Gotham, ou lorsqu’il laissait KGBeast se vider de son sang dans la neige – elle est un constant rappel de sa solitude. Qu’à chaque fois qu’il prend des risques, il finit seul et déséspéré. Contrairement à Pygmalion, il n’a pas vu son vœu se réaliser. Comme lui, il s’est mis à genoux devant la femme qu’il aimait. Comme lui, il a prié pour être (enfin) heureux. Contrairement à lui, la femme qu’il aimait lui a brisé le cœur. Dans une page absolument terrifiante – un gros plan sur le visage terrifié de Pyg – Batman réalise dans quel état il se trouve (enfin). Dans quel état il est depuis l’épisode du toît avec Sélina. Il est perdu. Meurtri. Seul.

Un épisode poignant que ce Batman #62, dont la conclusion viendra en surprendre plus d’un.

Mathieu Guitonneau

Libraire spécialisé

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